CARAVANE

Caravane est le titre de la dernière pièce de théâtre de Juliette Speranza, dramaturge dijonnaise auteure de Les hommes ne veulent plus mourir, éditions Christophe Chomant, 2008 et Ils étaient 29000, éditions Alna, 2011 et d'Angelo Mercen. Elle vient de sortir chez l'Harmattan.

Juliette a le don d'énerver, d'asticoter, de ne rien laisser en place, ni les certitudes, ni les conventions. Elle m'énerve. Surtout parce qu'elle a raison, parfois, en particulier lorsqu'elle écrit. Dans Caravane Juliette s'associe à Angelo Mercen pour mettre en scène la vie d'un homme, fils de gitan et d'une paysanne. Lino se lance dans un monologue intérieur qui va dialoguer avec les réminiscences de ses parents. La magie du théâtre permet la juxtaposition de ces temps différents et donc l'interrogation sans fin sur ce qui se passe, le lieu où cela se passe et le moment. Peu importe. Nous rentrons dans la tête d'un fils de gitan et de paysanne, d'un déraciné, d'un être perdu entre deux logiques de vie, entre deux sommes de contradictions qui le plient, l'obligent, le contraignent. Perdu dans tout cela, nous recevons les claques de cette réalité étrangère.

Loin des poncifs sur la gentillesse fondamentale des gitans face à la méchanceté du "monde bourgeois", Juliette Speranza et Angelo Mercen tentent juste d'esquisser une situation ingérable pour les individus. Ils nous montrent la violence pour ce qu'elle est : la voie sans issue inévitable qui se terre au sein de chacun de nous et qui attend patiemment de nous dévorer.

Pièce à lire, donc, mais surtout à ne pas rater lorsqu'elle sera mise en scène et jouée.